Remarques sur le projet

Il s'agit ici de l'avis donné lors de la 2nde concertation publique.

(voir aussi mon avis sur Souham 4)

Observations et questions concernant le projet « Euralille 3000 »

 dans le cadre de la 2nde concertation publique.

Avant tout, je voudrais vous remercier de mettre en place une série d’évènements visant à informer le public et à permettre à tous les Lillois et métropolitains d’apporter un avis, une seconde fois, sur le futur visage de la turbine tertiaire. Comme vous le rappelez dans votre journal, Euralille est occupée à 95% et il est temps de se tourner vers l’avenir pour que la ville continue son développement. Dans l’ensemble, je suis très enthousiaste concernant ce projet urbain. Il est inutile de revenir sur le constat que vous avez dressé afin de pouvoir passer directement aux petites remarques que j’aimerais émettre ; celles-ci s’apparentent plus à des questions, des observations/suggestions, qu’à de véritables critiques négatives.

 

1) Corriger.

Concernant la couverture du périphérique, même si je comprends le problème du coût, pourquoi laisser un espace au milieu du parc des Dondaines (qui devrait être réaménagé pour Euralille 3000) et un autre à côté d’Axe Europe ? Si l’idée de créer un nouveau centre névralgique sur la place piétonne au-dessus du périphérique est excellente, ne faudrait-il pas le relier directement au parc des Dondaines, en évitant d’avoir une vue sur le périphérique alors que l’on déjeune sur la place ? Laisser ces deux ouvertures sur le périphérique dans le programme contrarie la volonté de réduire l’impact de ce boulevard sur le quartier d’affaires.

Pour beaucoup de Lillois, Euralille n’est qu’un centre commercial. Pensez-vous qu’Euralille 3000 va permettre de faire prendre conscience à tous de l’importance économique de ce quartier (3e quartier d’affaires de France), que c’est tout un ensemble ? Des écrans géants (plusieurs sur la place des Buisses ?) par exemple pourraient diffuser des informations culturelles, des actualités (nationales et internationales), mais aussi des informations du quartier (nombre de personnes dans les bureaux, les travaux en cours, etc.). La communication quotidienne autour du quartier d’affaires permettrait d’identifier plus clairement le secteur. Des petits détails - comme une meilleure signalétique, même « flashy », dans tout le quartier (indication des bâtiments, temps de parcours, plan du quartier avec noms des bâtiments, etc.), une station de métro appelé Lille Europe-Euralille, etc. - peuvent y aider.

 

2) Inviter.

Si j’ai eu une bonne surprise avec l’apparition du lot 10.9 (voir plus bas), qu’en est-il du lot « Souham 5 », à côté de Souham 4 ? Sur un rendu (publié sur le site de Saison-Menu), ce lot semble avoir diminué fortement en hauteur. Il ne faut pas oublier qu’il s’agit ici probablement de l’entrée principale au parc Matisse et qu’il faut donc particulièrement soigné l’ensemble Souham 4 / « Souham 5 » pour inviter le passant à s’arrêter dans le parc.

Comment pensez-vous concrètement attirer les Lillois à venir dîner/se divertir dans le quartier ? Évidemment, je peux imaginer que les restaurants connaîtront une fréquentation importante par le simple fait que la métropole est fortement peuplée, mais quelle sera la valeur ajoutée du quartier qui fera que des Lillois viendront ici et non dans le centre où ils ont leurs habitudes ? Un seul élément (comme un bar panoramique sur la tour Chaude rivière) ne suffira probablement pas, les bars/restaurants non plus. Il faut ici ce qu’il n’y a pas ailleurs. Quid d’un bowling, d’un cinéma (comme va le proposer Eurorennes), d’une boîte à rire ? Quel sera le parcours du noctambule ? Ira-t-il uniquement sur la place du polder ou aussi du côté de Chaude rivière ? Est-il possible de connecter les deux durant la nuit ? Par ailleurs, pour relier ces deux secteurs, est-il envisageable de rendre vivant la gare Lille Europe dont le côté Bd de Turin est vide ?

 

3) Profondeur.

En étudiant les rendus d’Euralille 3000 (Keurk Architecture), et même si cela ne donne qu’une idée des volumes envisagés, qu’une esquisse des bâtiments, deux éléments sont à noter :

- comme avec Ekla Life, Lille renoue avec les logements en hauteur avec la proposition de deux immeubles supérieurs à 15 étages (R+17 et R+18 environ) autour du parc Matisse. C’est une bonne chose pour accueillir plus de Lillois dans un environnement vivant, proche des emplois et des commerces signalant, une fois de plus, que la densité déclenche la proximité.

 

- dans l’expo-parcours de cette année, il est mentionné que des immeubles de bureaux du Bd de Leeds (côté carrefour Pasteur) vont permettre d’isoler ces logements du parc Matisse du bruit du périphérique en créant une 2nde ligne. Ce qui est surprenant, c’est que ces bureaux ne semblent pas très élevés. Ainsi, en partant du parc Matisse, la 1ère ligne de logements cachera la 2nde ligne abritant les bureaux ; cela se voit clairement sur un rendu de Keurk Architecture. Ne craignez-vous pas de donner l’image d’une façade unique donnant sur le parc sans qu’il n’y ait de vie derrière ? Si l’immeuble en R+17 du Boulevard de Leeds est peut-être trop élevé pour que l’immeuble de bureaux derrière lui soit visible (il faudrait un édifice de 60m), ne pouvons-nous pas imaginer que l’un des immeubles de bureaux (2nde ligne) soit plus élevé que l’un des immeubles de logements (par exemple, celui côté de la Cité des affaires) ? Cela permettrait de donner l’impression qu’il y a quelque chose derrière, une continuité entre les quartiers. 



Il existe peut-être le même problème sur le polder métropolitain. Aujourd’hui, de la place Fr. Mitterrand ou du parc Matisse, il n’y a rien de visible derrière les deux tours ; je devine à peine Axe Europe une fois sur le viaduc Le Corbusier. Euralille 3000 propose la construction d’un immeuble de 13 étages environ (en forme de « h »), mais je me demande si cela suffira à donner de la profondeur.

> la profondeur, le fait de voir les bâtiments en arrière-plan, participe à connecter les quartiers entre eux (l’un des objectifs d’Euralille 3000). Il faut créer un appel urbain pour suggérer qu’il y a encore des activités derrière ce « Central Park lillois », encore des personnes, encore de la vie et qu’Euralille ne s’arrête pas qu’au parc Matisse. Pour assurer une continuité entre les secteurs (et provoquer l’attractivité), la couverture du périphérique n’est pas forcément suffisante, cet élément doit être couplé à l’idée de profondeur.

 

Pourrions-nous imaginer de rendre transparent une partie du toit de la gare Lille Europe, entre la Tour de Lille et la future 3e tour donnant sur le parc Matisse ? La gare est très ouverte vers l’extérieur grâce à des « parois vitrées », mais elle possède curieusement un toit lourd qui gâche cette idée de légèreté. La transparence de cette partie du toit permettrait d’avoir, dès la gare, une vue sur les édifices qui s’élancent au-dessus de cet équipement, mais aussi sur bien d’autres bâtiments du quartier, dès la sortie du TGV. Et puisque je présente ce secteur, pourrions-nous avoir de nouveaux éléments concernant la gare routière souterraine mentionnée dans le bilan de la 1ère concertation publique ?

 

4) Multipolarité.

Le principal questionnement à propos de cet important programme urbain concerne la linéarité des IGH lillois. Certes, la couverture du périphérique permet de relier les quartiers, mais une nouvelle fortification, dont les trois tours seraient les créneaux, semble se créer ici ; l’axe des trois tours est renforcé par la 3e tour de la gare, mais aussi par les bâtiments encadrant le Boulevard de Leeds. Il ne s’agit pas de remettre en cause la construction du lot 10.6, bien au contraire je l’encourage, mais de trouver une solution pour briser cette longue ligne qui se dessine.

La solution passerait, selon moi, par deux modifications :

 

- élever les lots 10.8 et 10.9 afin de créer un bloc à Chaude rivière qui atténuerait cet effet linéaire. Ce qui provoque en effet un alignement accentué des trois tours, c’est surtout l’isolement du lot 10.6. Il s’agit d’un IGH qui va attirer le regard sur lui, comme le font les deux tours déjà construites qui se détachent clairement de la skyline lilloise. Cette tour, en plus d’être probablement nécessaire au développement, apparaît également comme un signal du renouveau du quartier (et de la métropole lilloise), un beffroi du XXIe siècle. La construction d’autres bâtiments relativement hauts permettrait de briser cet effet d’isolement (entraînant la linéarité des IGH). Evidemment, il ne s’agirait pas de tours de 100m pour ces lots 10.8 et 10.9 (on ne peut pas multiplier les mètres carrés sans réfléchir), mais des bâtiments qui iraient jusqu’à R+15, au moins, les détacheraient du reste de Chaude rivière (35/40m maxi), un peu à l’image Ekla Life ; on peut imaginer deux constructions ayant chacune une partie en R+8 (pour bien s’intégrer avec les voisins) et une autre en R+15/16 pour accompagner 10.6 et Ekla Life. Chaude rivière deviendrait donc un bloc et non uniquement un ensemble constitué d’une tour et de simples R+8. Cet ensemble ferait écho au bloc se développant autour du Bd de Leeds et du Bd de Turin. De plus, cela ne permettrait-il pas d’éviter que la tour n’écrase trop brutalement ses voisines ? Varier les hauteurs entre Ekla Life (55m), 10.8 (65m ?) et 10.9 (60m ?) apporterait une esthétique supplémentaire.

 

- créer un immeuble plus élevé, pour attirer le regard, en dehors de cette ligne d’IGH suivant le périphérique. Puisque Souham 4 est déjà bien avancé et qu’il ne semble plus possible de revenir dessus, je pense au bâtiment de la Place des Buisses et/ou à celui situé entre Eurocity V (60m) et la Cité administrative (79m), longeant les rails. Le premier bâtiment permettrait de créer un signal qui annoncerait le début du quartier d’affaires et ferait écho à la 3e tour de la gare (et tous ses voisins), mais aussi au bâtiment en face de la Cité administrative. Ce dernier, la seconde élévation proposée, ferait office de miroir à la Cité administrative pour relier, architecturalement, les secteurs malgré les rails (connecter Euralille-centre/Chaude rivière à Lille Grand Palais/Euralille 2), mais il participerait également à la brisure de la linéarité des IGH ; évidemment, pour attirer l’œil et créer un appel urbain, il faudrait alors faire un peu plus haut que les cinq tours Eurocity, sans forcément aller jusqu’à 100m (80m ?).

      L’idée est clairement de multiplier les centres de gravité : la place des Buisses et l’entrée du centre commercial ; le polder et la gare Lille Europe ; Chaude rivière. Ainsi, la linéarité est brisée au profit d’un ensemble s’inscrivant dans un cercle nourri par des repères architecturaux, se faisant écho par des « sauts de puce » urbains. Les directions, les destinations se multiplient et la vie s’écoule dans l’ensemble du quartier plutôt que le long de la gare Lille Europe.

 


Je ne propose pas de doubler la surface des bâtiments en construisant deux fois plus hauts, ce qui n’est pas forcément viable économiquement, mais il me semble que la demande tertiaire et de logements pourrait peut-être absorber quelques élévations ici ou là dans le but de rendre l’ensemble plus harmonieux. Avec ce type de mouvements créés, j’ai l’impression que le quartier prend un tournant différent. Est-ce que le modèle économique est plus difficile si un ou deux bâtiments du Bd de Leeds passent à 14 étages au lieu de 12 ? Les lots 10.8 et 10.9 ne peuvent-ils pas dépasser légèrement Ekla Life ? Est-ce que, d’un point de vue urbanistique, de telles corrections rendent le projet plus instable économiquement ?

Par ailleurs, je souhaite souligner que Chaude rivière comporte assez peu de logements, et au-delà du périphérique (voir mon nouveau site). De quoi seront composés les lots 10.8, 10.9 et la fameuse tour (qui, à elle seule, comprend entre 45 000 et 60 000m2) ? Des logements sont-ils envisagés ? Peut-être quelques loisirs (cf. notre petit 2), en lien avec des restaurants du 10.6 et le Casino ?

 

Pour conclure, je rappelle mon enthousiasme concernant Euralille 3000. Je ne propose que quelques élévations de hauteur ici ou là afin d’enrichir l’un des aspects du programme : relier. Dans le bilan de la 1ère concertation paru il y a un an, les Lillois ont clairement exprimé le fait que les immeubles en hauteur ne posaient aucun problème, tant qu’ils restaient à Euralille et qu’ils renvoyaient à une nécessité et au renouveau économique de la ville. Évidemment, ces surélévations ponctuelles (Bd de Leeds, polder et 10.8/10.9) et la réalisation d’un ou deux bâtiments plus hauts de 80m (Pont des Flandres et place des Buisses, le premier me semblant encore plus important que le second) apporteraient des mètres carrés de logements et de bureaux supplémentaires et je suis bien conscient de la complexité du modèle financier des immeubles de plus de 50m. Cependant, l’attractivité du quartier permet d’émettre de telles hypothèses ; au final, Euralille 3000 est similaire (en terme de mètres carrés) à Eurorennes et en deçà des projets actuels de La Part-Dieu (évidemment, Lille n’est pas Lyon). J’espère qu’Euralille pourra rester le second quartier d’affaires de province, alors que La Part-Dieu prend une importance considérable et que d’autres quartiers français sont en devenir (Euroméditterranée, Eurorennes, Euratlantique…) et vont concurrencer la turbine tertiaire lilloise. Plus qu’une réponse à la demande, une simple élévation, ponctuelle, de quelques étages de tel ou tel bâtiment pourrait changer plus encore la physionomie du quartier, image qui serait la base de la répartition de la vie dans Euralille. J’espère que le bilan de cette seconde concertation permettra d’éclairer mes questionnements mis en lumière ici.

 

Avec tous mes encouragements et mes félicitations,

lille.en.grand@gmail.com

                                                                                     www.lille-en-grand.jimdo.com / @lille_en_grand